• Ensemble FALDI FSM

TR :Merci lakhdhar

de la part de Mohmed-Lakhdar ELLALA on 08/04/2015 23:31






Début du message transféré :

Expéditeur: Nadia Chaabane <nadiachbn@...>
Date: 6 avril 2015 23:08:58 UTC+02:00
Destinataire: "ellala1@..." <ellala1@...>
Objet: Merci lakhdhar

Il y a 15 ans, je vivais en France et le 6 avril lorsque j’ai appris le 
décès de Bourguiba, j’ai eu un petit pincement. Pourtant je ne le 
portais pas dans mon cœur, tous les tunisiens que je fréquentais étaient
 à différents niveau ses victimes. Mais c’était comme si on tournait une
 page de l’histoire du pays.
 Je faisais partie d’une association 
fondée en 1981 par des fractions de la gauche tunisienne l’Association 
des Tunisiens en France. Et voila que l’association décide d’organiser 
une rencontre pour parler de Bourguiba et lui rendre en quelque sorte 
hommage.
  Sur le moment j’y étais opposée, qu’est ce que 
l’association avait  à avoir avec tout ça. On avait plutôt l’habitude 
d’organiser des rencontres pour dénoncer les atteintes aux droits de 
l’homme en Tunisie, pour soutenir les bastions de résistance dans le 
pays, pour nous faire les porte-voix de ceux qui ne pouvaient se faire 
entendre, qu’est ce qu’on avait à avoir avec Bourguiba le despote. Le 
Délégué Général de l’association à l’époque Si Mohamed-Lakhdhar Ellala 
m’a donné une très belle leçon de vie ce jour là. Lui qui a connu la 
prison sous Bourguiba, qui a été exclu de l’université et qui a été 
obligé de prendre le chemin de l’exil pour poursuivre ses études, m’a 
dit. « Tu ne peux pas arracher un ongle de ton pied même s’il est laid, 
Bourguiba est un homme multiple et complexe, oui il a été despote mais 
il a été aussi un chef d’état qui avait de l’ambition pour son pays et 
voulait le propulser dans son siècle et le faire avancer, il fait partie
 de notre histoire et il a été derrière des acquis qu’on ne peut 
occulter ». Merci Lakhdhar, tu m’as amenée ce jour là à sortir du 
raisonnement binaire dans lequel on se retrouve très fréquemment 
prisonnier et on pense le monde noir ou blanc en occultant les nuances 
et l’objectivité.  
 Mes 3 années à l’ANC m’ont amené à beaucoup 
réfléchir à cela. Toute une génération avait de l’ambition pour ce petit
 pays et elle a beaucoup donné, malheureusement les dirigeants étaient 
prisonniers de leur paternalisme et n’ont pas fait confiance à l’élite 
qu’ils ont veillé eux même à former. En 81, le pays aurait pu prendre un
 autre tournant, … je n’irai pas plus loin dans la réflexion, je 
laisserai les historiens faire leur travail et tirer les conclusions.  

 La commémoration a eu lieu, c’était dans une salle dans le 9eme 
arrondissement, elle était pleine à craquer, des centaines visages 
connus et moins connus de la gauche tunisienne en exil et touts victimes
 quelques part de Bourguiba et pourtant ils étaient là. Un débat 
contradictoire a eu lieu en présence de Tahar Belkhodja ancien Directeur
 général de la sureté nationale, plusieurs fois ministre de Bourguiba, 
notamment de l’intérieur, qui a accepté de venir témoigner, il avait 
publié un livre, et répondre à la salle. 
 Il savait que tous les 
gens présents lui en voulaient car la plupart ont été exclus, 
emprisonnés, certains torturés  au moment où il était lui-même au 
gouvernail et qu’il portait une grande responsabilité. 
 Ce fut un 
moment de vérité très fort car ce qui motivait ceux qui étaient là 
c’était de rétablir la vérité et non de se venger. Le débat a été d’un 
haut niveau, ne ressemblant guère à ce que j’entends actuellement autour
 de la justice transitionnelle, il n’était pas question de tourner la 
page mais de faire connaitre la vérité pour que cela ne se reproduise 
plus jamais.


Revenir à la vue par date: par fil or A plat